Indopacifique – États-Unis – France : Et si la France était attendue dans le Pacifique des Américains ?

Le Forum du Pacifique, qui s’est tenu du 12 au 14 février 2025 a accueilli le Forum de défense d'Honolulu. Il s’agissait avant tout d’une opération de marketing pour les coopérations de défense avec, en perspective, le renforcement d’alliances de fait, face à la Chine. Les États-Unis avaient veillé à ce que tous leurs alliés dans la zone Asie-Pacifique, de l’Australie aux Philippines et Singapour soient bien représentés. La France était également conviée, mais de façon marginale, sans être reconnue comme un partenaire majeur dans la région. Washington sanctionne la France de choix sur la zone, trop éloignés des siens. Une réserve que les États de la région pourraient ne pas partager alors que les excès, les retournements et la brutalité de Donald Trump les inquiètent.

The Pacific Forum, held from February 12 to 14, 2025, hosted the Honolulu Defense Forum. This was primarily a marketing operation for defense cooperation, with a view to strengthening de facto alliances in the face of China. The United States ensured that all its allies in the Asia-Pacific region, from Australia to the Philippines and Singapore, were well represented. France was also invited, but only marginally, without being recognized as a major partner in the region. Washington criticizes France for making choices in the region that are too far removed from its own. A reservation that the states of the region may not share, as they are worried by Donald Trump's excesses, reversals and brutality.

FAITS

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En février 2025, le Forum du Pacifique a accueilli le Forum de défense d'Honolulu.

ENJEUX

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Pour l’Indopacifique
favoriser la collaboration entre l’industrie de la défense, les technologies critiques et les secteurs de la sécurité économique,
améliorer la base industrielle et la lutte contre les menaces régionales.

Pour la France
s’imposer en tant que puissance d’équilibre,
asseoir sa légitimité dans l’Indopacifique.

Pour les États-Unis
promouvoir des partenariats public-privé pour innover, positionner et recapitaliser les capacités américaines et alliées,
contrer les menaces stratégiques et renforcer la dissuasion.

COMMENTAIRES PROSPECTIFS

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Sur les enjeux de la rencontre, tout est dit par l’amiral Samuel Parparo, commandant des forces des États-Unis pour l’Indopacifique. En ouverture des débats, il ne mâche pas ses mots. Les États-Unis et leurs alliés sont confrontés à un axe émergeant de trois autocraties qui s'entraident. « La république populaire de Chine, la Russie et la Corée du Nord ont formé un triangle de fauteurs de troubles. (…) Leurs transferts de technologies et leur coopération diplomatique menacent de transformer le Pacifique qui est libre et ouvert en un espace contesté et contrôlé. » Il qualifie de cruciales les opportunités de collaboration dans le domaine de la défense : « En coordonnant nos efforts, nous pouvons atteindre la production de pointe que l'environnement exige. »

Les débats se sont concentrés sur les capacités nécessaires pour prévenir les menaces et préserver la paix et la stabilité dans la région indopacifique. Les sujets débattus ont été :

• opérationnaliser l’urgence,
• développer et maintenir des capacités de défense intégrées,
• exploiter les technologies critiques à grande échelle,
• stimuler l’innovation et la compétitivité dans les initiatives de sécurité,
• construire une base industrielle solide,
• promouvoir la sécurité régionale.

Parmi les 78 intervenants, 58 sont américains – 17 officiers généraux ou autorités de défense, 22 représentants du Congrès et d’organismes officiels, 19 industriels. Parmi les 20 intervenants étrangers on retrouve les partenaires des États-Unis habituellement cités dans la région : 4 Australiens, 3 Britanniques, 3 Japonais, 2 Canadiens, 2 Allemands puis les représentants des Philippines, de Singapour de la Nouvelles Zélande, et, quelque peu perdus, un Tchèque et un Lithuanien. Enfin, témoignant au titre de l’Europe dans une session parallèle, le représentant de la France auprès du commandement américain de la zone.

La France est un acteur d’importance de la région, le seul pays européen qui dispose de territoires à la fois dans l’océan Indien et dans l’océan Pacifique. La place marginale qui lui a été accordée dans ce forum retient l’attention. Elle fait fi de nos territoires d’outre-mer : la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, les Terres australes et antarctiques. Elle passe sous silence le déploiement dans la zone du groupe aéronaval français, le porte-avions Charles de Gaulle, son escadre aérienne embarquée et les bâtiments d’escorte. Dans le cadre de la mission Clémenceau 25, après avoir participé à des sessions d’entraînement dans les zones malaisienne, singapourienne et indonésienne, le Charles de Gaulle a rejoint la mer des Philippines pour prendre part à l’exercice Pacific Steller avec le porte-avions américain Carl Vinson, et le porte-aéronef japonais Kaga. Des manœuvres exceptionnelles puisqu’elles voyaient coopérer les porte-avions de trois nationalités.1 Cette mise à l’écart peut s’expliquer par les choix stratégiques de la France, notamment à l’égard de la Chine, jugés trop éloignés de ceux des États-Unis.

Mais cette prise de distance peut avoir changé la donne. Le retournement des États-Unis à l’égard de la Russie, la brutalité de la nouvelle administration présidentielle américaine à l’égard de Volodymyr Zelensky tout autant que la revendication territoriale sur le Canada, voire le Groenland, ont très probablement questionné les pays de la zone Asie-Pacifique. Tous peuvent s’imaginer se trouver dans une situation comparable. L’Australie n’en sera-t-elle pas à ce stade si la dérobade États-Unis sur le programme de sous-marin Aukus se confirme ?2 Cela pourra être l’occasion pour la France de restaurer sa légitimité.

Edouard Valensi, Asie21

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1. Ministère des Armées, Clémenceau 25 – Bilan de l’exercice trilatéral Pacific Steller, Marine nationale, 24/02/2025
2. Defensemirror.com, Australia to consider French Submarines Amid Aukus Deal Concerns?, 11/03/2025